Davia Ouaklil, animatrice des Chti’Bonheurs (Lille)

et pair aidante pour Un chez soi d’abord

Extrait des actes du colloque Expair Rennes octobre 2018
Davia Ouaklil est médiatrice de santé paire au sein du dispositif « Un chez soi d’abord » de Lille. Elle est également animatrice dans le Groupe d’Entraide Mutuelle « Les Ch’tits Bonheurs » depuis plus de trois ans. C’est dans ce GEM qu’elle a découvert concrètement la pair‐aidance. C’est alors devenu une volonté de sa part d’utiliser son vécu pour venir en soutien à ses pairs. Quand l’occasion s’est présentée elle a choisi d’en faire son métier, un métier en émergence où tout reste à faire.
Comment suis‐je devenue pair‐aidante salariée ? Le président du GEM dans lequel je suis animatrice m’a appris que le dispositif Un chez soi d’abord de Lille recherchait un médiateur de santé pair. Après m’avoir expliqué en quoi consiste ce métier que je ne connaissais pas, j’ai immédiatement voulu postuler. Je me suis également beaucoup documentée. Je me suis posé la question de savoir si j’étais prête pour ce poste et si j’avais le recul nécessaire sur mon parcours en psychiatrie. J’ai trouvé très intéressant la démarche d’exploiter son passé pour le mettre à profit pour mes pairs. J’ai suivi une procédure d’embauche comme pour n’importe quel autre poste. On m’a proposé un contrat à durée indéterminée. Je suis médiatrice de santé paire sur le dispositif Un chez soi d’abord depuis un an.
L’avantage premier pour moi d’une pratique d’accompagnement de mes pairs est d’avoir une relation privilégiée avec les personnes accompagnées car je peux partager mes faiblesses et mes fragilités, mon intimité. Je suis ainsi reconnue comme une professionnelle mais pas seulement : je suis dans un entredeux. Il y a souvent une confiance qui s’installe rapidement avec la majorité des personnes à qui j’ai dévoilé mon passé de pair. C’est impressionnant ce qui se passe dans ces moments‐là ! C’est génial ! J’ai un passé de travailleur social et je n’avais jamais ressenti cette proximité avec les personnes accompagnées. Le fait de partager des choses de l’ordre de l’intime, ça crée une relation particulière, même si je suis toujours en intervention avec un collègue en binôme. J’incarne en quelque sorte le fait d’aller bien malgré des troubles de santé mentale et je suis porteuse d’espoir. Quand je dis que c’est possible d’aller bien, j’ai une crédibilité que n’ont pas forcément mes collègues.
Être salariée est une façon de reconnaître le savoir que j’ai acquis de par mon expérience, contrairement à mes collègues qui eux sont diplômés et exercent leur profession avec un savoir qui leur a été transmis en formation. C’est la différence entre le savoir expérientiel et le savoir professionnel. Être salariée, ça me donne une certaine légitimité vis‐à‐vis de mes collègues, d’autres professionnels et des institutions. Je suis reconnue expert d’expérience, comme on nous appelle. Mais ceci dit, le salariat ne suffit pas pour que tous les professionnels me reconnaissent des compétences. Il arrive que certains me voient d’abord comme une malade.